BIOGRAPHIE
Ada Louise Grace Palmer est née le 9 juin 1981, à Washington D.C.
Elle a grandi à Annapolis, Maryland, et a étudié l’histoire de la Renaissance au Bryn Mawr College. Elle était particulièrement fascinée par l'histoire des idées, aux raisons qui font évoluer celles-ci au fil des civilisations humaines, ce qui fait qu'une hérésie devient acceptable ou qu'un lieu commun disparaît. Elle a passé son doctorat (PhD) à Harvard, en consacrant une partie de ses études à Florence et à Rome. Diplômée en 2009, elle a enseigné à l’Université A & M du Texas de 2009 à 2014 avant de déménager à Chicago et d’enseigner l’histoire à l’Université de cette ville. Elle a publié de nombreux articles et des ouvrages historiques, tels que The Recovery of Classical Philosophy in the Renaissance, a Brief Guide (2008, avec James Hankins) et Reading Lucretius in the Renaissance (2014). Elle a également supervisé l'ouvrage Homer Among the Moderns dont les chapitres ont été rédigés par ses étudiant·e·s.
Elle est par ailleurs musicienne, compositrice et chanteuse.
Elle devint très tôt lectrice de science-fiction et de fantasy, en grande partie grâce à la bibliothèque de son père, lui-même fan. Son premier roman, Trop semblable à l’éclair, publié en 2016, a remporté le prix Compton Crook, a été finaliste du prix Hugo et a été nommé “livre d’honneur Tiptree”. C’est le point de départ de sa tétralogie Terra Ignota, qui a remporté le Grand prix de l’imaginaire 2023.
Elle a remporté le prix John W. Campbell Memorial en tant que meilleure nouvelle autrice en 2017. Lors de son discours de réception de la récompense, elle a annoncé publiquement qu'elle souffrait de la maladie de Crohn et du syndrome de Stein-Leventhal.
Source principale : Locus, mai 2018.
UNIVERS
- Terra Ignota (SF)
L'action se déroule sur sept jours du mois de mars 2454. La paix règne depuis trois siècles sur Terre et l’espérance de vie atteint cent trente ans. Depuis 2266, la semaine de travail s’est réduite à vingt heures et les foules ont déserté les rares professions à nécessiter davantage. La famille nucléaire n'existe plus, remplacée par le bash, un collectif de vie regroupant quatre à vingt amis choyant ensemble enfants et idées, dans un havre de discussion et de jeu partagés.
En 2073, Mukta, une voiture volante, a fait le tour du globe en à peine plus de quatre heures. Dès lors, n’importe qui peut se permettre tous les jours l’aller-retour entre n’importe quels points de la planète. Cet événement a sonné le glas de la nation géographique. En 2454, la circulation des voitures volantes est sous le contrôle du bash Saneer-Weeksbooth, et seuls les Utopistses ont leur propre système de transport.
En 2131 Thomas Carlyle a enfoncé le dernier clou dans le cercueil de la nation. Par la Grande Renonciation, il s'est opposé à la Guerre des Églises en proposant une alternative à l’État-nation et en baptisant du nom de Ruche l'union moderne, aux membres rassemblés non par quelque hasard de naissance, mais par choix, par une culture et une philosophie partagées. Chaque Ruche a son propre système juridique, ainsi que des systèmes de gouvernement, de langue et de tenue vestimentaire uniques, et la plupart ont une capitale. Les rapports entre les sept Ruches sont fixés par la charte de la Libre Alliance universelle de Romanova, dirigée par l'Empereur.
En 2454, elles sont sont au nombre de sept avec, par ordre d'importance quantitative de leurs membres : les Maçons, les Cousins, les Mitsubishi, les Européens, les Humanistes, les Gordiens et les Utopistes. Parce que le système des Ruches repose sur le volontariat, il existe aussi trois groupes de hors-Ruche, reconnaissables à leurs écharpes. Tous les mineurs sont des droit-gris jusqu'à ce qu'ils passent leur examen de Compétence adulte et déclarent leur allégeance.
Dans ce monde de 2454, la notion de genre est en voie de disparition, après celle de religion, discréditée par la Guerre des Églises. Le langage utilise un pronom neutre qui ne présage pas de l’identité de la personne concernée. De plus, ceux qui utilise les pronoms genrés, comme Mycroft Canner, font parfois davantage allusion à l'allure ou aux manières de la personne évoquée qu'à sa nature biologique. Le rôle de religieux n'a pas totalement disparu mais est confié aux sensayers qui cumulent les fonctions de conseillers spirituels et de psychanalystes.
Chacun est doté d'un traceur-oreillette qui permet de communiquer, surveille l'état de santé et appelle à l'aide en cas de besoin, mais aussi enregistre tous les déplacements de celui ou celle qui le porte.
Page Wikipedia (consulté en juin 2020)
* Prix Hugo 2022 : finaliste (meilleur série)
* Grand Prix de l’Imaginaire 2023 : victoire (roman étranger, pour les tomes 1 à 5)
ROMANS
R.01 Too Like the Lightning (univers Terra Ignota-01), Tor, mai 2016
Traduction : Trop semblable à l'éclair, Le Bélial, traduit par Michelle Charrier, octobre 2019
Au XXIIe siècle a été créé le Programme des Servants, qui permet aux criminels de servir la communauté leur vie durant au lieu d’aller en prison. C'est ainsi que le tueur en série Mycroft Canner, responsable de crimes particlièrement horribles, a été intégré au bash Saneer-Weeksbooth. C'est là que Carlyle Foster se présente pour remplacer son prédécesseur décédé. Il assiste à l'éveil à la vie des petits soldats en plastique par le jeune Bridger. Mycroft l'attrape à la gorge avant de le relâcher. Carlyle jure de garder le secret sur le don mystérieux de Bridger qui a été recueilli par le bash mais dont on ignore l'origine.
En parallèle, on découvre que la liste des Sept-Dix, les personnalités les plus influentes de l'Alliance, a été dérobée au siège du Black Sakura qui s'apprêtait à la publier. Ce vol est susceptible de bouleverser les rapports de force entre Ruches.
C'est ainsi que se trouve lancé un enchaînement qui pourrait conduire à ce qui a disparu depuis trois siècles au point que personne n'est plus capable de l'envisager : la guerre. En attendant, tout le système politique est en ébullition. (P.C.)
Page Wikipedia : https://en.wikipedia.org/wiki/Too_Like_the_Lightning
L'avis de FeydRautha : https://lepauledorion.com/2018/03/28/too-like-the-lightning-terra-ignota-1-4-ada-palmer/
L'avis de Gromovar : https://www.quoideneufsurmapile.com/2016/06/too-like-lightning-ada-palmer-encore-un.html
* Prix Goodreads 2016 : 14e place (science fiction)
* Prix James Tiptree Jr 2016 : finaliste (gender-bending SF)
* Prix Compton Crook 2017 : victoire (Balticon – meilleur 1er roman)
* Prix Locus 2017: 11e place (meilleur premier roman)
* Prix Locus 2017 : 18e place (meilleur roamn SF)
* Prix Hugo 2017 : 5e place (meilleur roman)
* Prix Prometheus 2017 : présélection (meilleur roman de SF libertarien)
* Prix Planète-SF 2020 : finaliste
R.02 Seven Surrenders (univers Terra Ignota-02), Tor, février 2017
Traduction : Sept Redditions, Le Bélial, traduit par Michelle Charrier, mars 2020
La révélation, à la fin du premier volume, d'assassinats commis depuis plusieurs siècles, en parfaite connaissance de tous les dirigeants, d'individus anonymes mais placés par les circonstances à des nœuds névralgiques de l'histoire, sape les bases de l'Utopie. La paix et l'ordre ne reposaient que sur le sacrifice d'innocents. L'opinion publique doit-elle savoir ? Ce prix était-il justifié ? Les dirigeants doivent-ils payer ? Le système des Ruches est-il condamné ? Quels rôles peuvent jouer Bridger, l'adolescent-prodige, et J.E.D.D. Maçon ? Et surtout, la même terrible question : dans ce monde pacifié depuis trois siècles, la guerre pourrait-elle faire son retour ? (P.C.)
L'avis de FeydRautha : https://lepauledorion.com/2018/04/14/seven-surrenders-terra-ignota-2-4-ada-palmer/
L'avis de Gromovar : https://www.quoideneufsurmapile.com/2017/03/seven-surrenders-ada-palmer.html
* Prix Goodreads 2017 : 20e place (science fiction)
* Prix BSFA 2017 : présélection (meilleur roman)
* Prix Locus 2018 : 9e place (meilleur roman SF)
* Prix Hugo 2018 : présélection (meilleur roman)
R.03 The Will to Battle (univers Terra Ignota-03), Tor, décembre 2017
Traduction : La Volonté de se battre, Le Bélial, traduit par Michelle Charrier, février 2021
Les révélations sur l'existence et le rôle joué par O.S. font des ravages. Les uns estiment que la stabilité du monde des Ruches vaut le sacrifice de vies humaines tandis que d'autres y voient un marché d'une insupportable immoralité. Chaque camp trouve son hérault. Les premiers soutiennent Ojiro Cardigan Sniper alors que J.E.D.D. Maçon, ramené de la mort par Bridger, promet d’en finir avec le système des Ruches dont il exige une reddition inconditionnelle sans s’engager sur ce qui suivra.
Tous se préparent à une guerre qui paraît désormais inévitable, même si la dernière remonte à trois siècles. Les incidents se multiplient.
Fidèle à son rôle de chroniqueur, Mycroft Canner, de plus en plus instable, se demande avec angoisse d’où viendra l’étincelle fatidique, au cours de conversations avec le guerrier grec Achille, le philosophe Thomas Hobbes, Apollo Mojave qu’il a assassiné il y a des années et ... le lecteur. (P.C.)
L'avis de Gromovar (consulté en janvier 2018)
L'avis de FeydRautha (consulté en juin 2020)
* Prix BSFA 2017 : présélection (meilleur roman)
R.04 Perhaps the Stars (univers Terra Ignota-04), Ad Astra / Head of Zeus, octobre 2021
Traduction (pour la première partie) : L'Alphabet des Créateurs, traduit par Michelle Charrier, Le Bélial, février 2022
Traduction (pour la seconde partie) : Peut-être les étoiles, traduit par Michelle Charrier, Le Bélial, octobre 2022
Cette fois, la guerre, redoutée par beaucoup, espérée par certains comme un moindre mal, est déclenchée. Elle commence par la désactivation des traceurs et l’indisponibilité du système des voitures qui abolissait les distances. Désormais, la géographie reprend sa place.
D’un côté, les Recréateurs, qui soutiennent Cornel « Caesar » Maçon dans son projet de refonder la société, et de l’autre, les Protecteurs de Ruches, qui y sont opposés et au premier rang desquels se place la Ruche Mitsubishi, s’affrontent.
Les Mitsubishi déploient une flotte en Méditerranée en affirmant vouloir délivrer J.E.D.D. qui refuse de prêter le serment des Maçons qui en ferait le successeur officiel de Cornel Maçon. Quand Jehovah exige que tous se soumettent sans condition à lui et à sa volonté, la situation en fait que s’exacerber.
Les Cousins essaient tant bien que mal de limiter les effets des violences déployées. Tandis que plane la menace des harbingers, ces armes apocalyptiques, les Utopistes ne tardent pas à devenir la cible générale à la suite d’attaques qu’on leur attribue, même si certains doutent de leur responsabilité.
Plusieurs dirigeants se retrouvent assiégés dans Romanova, d’autres personnalités de premier plan sont tuées ou disparaissent dans des circonstances mystérieuses.
Les alliances se font mouvantes et les Ruches elles-mêmes se divisent. Alors que les communications traditionnelles deviennent inopérantes et doivent être remplacées par des moyens astucieux, Mycroft Canner, désormais secondé par [Anonyme] A9, se fait le narrateur d’une situation qui bascule de plus en plus dans le chaos. D’autant que derrière cette guerre s’en profile une autre qui engage l’avenir de l’humanité. (P.C.)
L'avis de FeydRautha (consulté en octobre 2021)
L'avis de Gromovar (consulté en novembre 2021)
* Prix Locus 2022 : 11e place (roman de science-fiction)
* Prix Hugo 2022 : présélection(meilleur roman)
SÉLECTION DE RÉCITS
2017 New Gray Ring to Join the Olympic Five (nouvelle, SF), Shoreline of Infinity #8 ½, (Edinburgh International Book Festival Special Edition), août 2017
Traduction : Un anneau gris ajouté à l'emblème olympique, Utopiales 2019, ActuSF, novembre 2019
En 2275, à Lausanne, le Comité International Olympique annonce officiellement une modification du symbole olympique le plus célèbre. Lors des Jeux de 2280 qui se tiendront à Esperanza, dans l'Antarctique, un nouvel anneau apparaître, de couleur grise. Pourquoi un nouveau drapeau ? Pourquoi cette couleur ? (P.C.)
SÉLECTION D'ESSAIS
2016 The Key to the Kingdom, anthologie d'essais The Usual Path to Publication: 27 stories about 27 ways in, ed. Shannon Page, juin 2016
2017 Writing a Future in Which You Choose Your Own Nation, Tor.com, mars 2017
Lien Internet (consulté en juillet 2020)
2017 When We Try to Sort Writers Into ‘Plotter’ or ‘Pantser’, Tor.com, décembre 2017
Lien Internet (consulté en juillet 2020)
2017 Other Story Ingredients beyond World, Characters, and Plot, Tor.com, décembre 2017
Lien Internet (consulté en juillet 2020)
2018 Writing the Distant Future of Global Politics, Tor.com, mars 2018
Lien Internet (consulté en juillet 2020)
2020 Censorship and Genre Fiction—Let’s Broaden our Broader Reality, Uncanny #34, mai-juin 2020
Lien Internet (consulté en juin 2020)
2021 Expanding Our Empathy Sphere Using F&SF, a History, Uncanny #42, septembre-octobre 2021
Lien Internet (consulté en octobre 2021)
Pour Ada Palmer, l'une des mesures du progrès humain est l'expansion dans le temps de notre sphère d'empathie, c'est-à-dire l'éventail des êtres que nous considérons comme des personnes à part entière, méritant les mêmes droits, dignités et protections. Pour cette raison, des œuvres, bien que considérées comme progressistes à l'époque de leur création, peuvent susciter chez le lecteur d'aujourd'hui un malaise, à cause par exemple du rôle attribué aux femmes ou du traitement infligé aux animaux.
Dans cet article, Ada Palmer, s'appuyant sur de nombreux exemples, insiste sur le rôle joué par la science-fiction et la fantasy pour étendre notre sphère d'empathie, et étudie quelques uns des moyens utilisés. Elle cite l'exploration de formes alternatives de vie intelligente : robots, IA, androïdes, extraterrestres, clones, organismes artificiels ou génétiquement modifiés, etc., procédé susceptible de transformer ce qui relève à priori de la monstruosité en un être sympathique. Un autre outil consiste à changer ou à inverser le point de vue narratif en utilisant celui d'un extraterrestre, d'un robot ou d'une personnalité numérique. On trouve un équivalent dans le genre de la fantasy avec l'adoption du point de vue d'êtres fantastiques comme les elfes, les nains, les hobbits ou les orques, ou celui d'animaux, réels ou imaginaires.
En étendant le statut de personne à tant de types d'êtres aussi différents, la science-fiction et la fantasy ont contribué à maintenir les limites de notre sphère d'empathie dans un état d'expansion depuis plus d'un siècle, et jamais aussi rapidement qu'aujourd'hui. Ada Palmer fait le vœu qu'on poursuive sur cette lancée. (P.C.)
2021 Hopepunk, Optimism, Purity, and Futures of Hard Work, site web Before We Go Blog, novembre 2021
Lien Internet (consulté en novembre 2021)
Ada Palmer part du constat que le fait de se réveiller jour après jour pour découvrir que le monde est encore bouleversé par les crises affecte notre énergie, voire notre santé. C'est pourquoi, plus encore qu'à l'époque où Alexandra Rowland a inventé le terme "hopepunk", de telles histoires sont aussi rares que nécessaires.
Rowland a inventé le terme hopepunk en juillet 2017 comme étant "l'opposé du grimdark" qui se complaît dans la noirceur avec des personnages qui sont toujours égoïstes, vous poignardent dans le dos, vous laissent tomber ou ne pensent qu'à eux, et des systèmes toujours corrompus et irrécupérables. Depuis, les synonymes de hopepunk se sont multipliés : noblebright, solarpunk, greenpunk ou ecotopia.
Les récits hopepunk s'opposent également aux utopies. Ils ne montrent pas des sociétés qui ont atteint la perfection, mais qui évoluent vers un état meilleur grâce à des personnages qui mettent en avant la coopération, la résilience, les victoires partielles. Ce sous-genre est issu d'une culture de la résistance, en particulier la résistance anti-autoritaire, liée à ce que Malka Older a appelé la résistance spéculative.
Le hopepunk se situe aussi à l'opposé des histoires de princesses à la Walt Disney, dans lesquelles le protagoniste triomphe ou survit simplement en restant pur. Ces récits sont des héritages de la pensée providentialiste influencée par le puritanisme qui attend du destin qu'il préserve les purs.
Le hopepunk rejette ainsi trois facilités : le pessimisme cynique, l'optimisme béat et la foi en la pureté pour triompher des obstacles. Dans les histoires hopepunk, le chemin est long, dur, épuisant, c'est un labeur permanent. Terra Cognita relève du hopepunk parce que c'est une fiction sur la voie difficile vers la reconstruction.
Selon Ada Palmer, nous avons besoin de toutes sortes d'histoires, mais, parce que nous sommes fatigués, nous avons en particulier besoin du hopepunk et de ses personnages qui font des choix bons mais imparfaits, qui sont ralentis par leur épuisement, mais qui s'entraident pour se remettre sur pied et poursuivre leur chemin. Nous avons besoin de ces histoires, toujours, mais surtout en ce moment. (P.C.)
2021 A Society That (Pretends It) Doesn’t Recognize Gender, site web Nine Bookish Lives, novembre 2021
Lien Internet (consulté en novembre 2021)
La dystopie et l'utopie sont de remarquables outils pour examiner les questions sociales, telles que le genre. Un autre outil, plus subtil et moins évident, consiste à imaginer des avenirs dans lesquels l'égalité des genres a plus ou moins progressé et échoué.
Ada Palmer décrit son univers de Terra Ignota comme un avenir qui a perdu la bataille finale du féminisme et de l’égalité ds genres, ne remportant que des victoires partielles tout en laissant traîner des problèmes plus profonds. La paix qui a suivi la « Guerre des églises » du XXIIᵉ siècle a donné naissance à une société où des manifestations ouvertes du genre sont associées à la violence et à l’extrémisme religieux, ce qui les rend largement taboues. Les vêtements sont devenus moins genrés et les langues favorisant les formes neutres se sont développées. Les personnages utilisent le plus souvent le pronom « on » [traduction par Michelle Charrier du « they » de la VO] Mais on voit aussi les signes d’une tendance opposée. En particulier, le narrateur n'utilise pas le genre comme nous le faisons ou comme sa culture le fait habituellement, mais attribue des pronoms sexués aux personnages en fonction de ses propres idées sur les archétypes genrés.
Ada Palmer s’est inspirée de l’histoire des relations raciales dans son pays. L’issue de la Guerre de sécession et l’extension du vote à la population noire a servi de prétexte pour cacher d’autres inégalités majeurs, comme la ségrégation, les écarts de richesse et d'emploi, l'exclusion de l'éducation, etc. Ce déni se poursuit encore aujourd’hui.
Ainsi Terra Ignota décrit non pas un avenir où les différences de genres ont disparu mais un avenir qui le prétend. En surface, le genre n’est plus reconnu, mais, en profondeur, il continue à susciter des problèmes, d’autant plus graves qu’ils restent cachés.
Le résultat en est ni une utopie ni une dystopie, mais une dissonance, un monde où ne se posent pas les problèmes de genre que nous connaissons mais où en surgissent d’autres.
Elle espère que la lecture de Terra Ignota fournira aux lecteurs de nouveaux outils pour réfléchir à la manière dont le silence peut nuire aux mouvements de défense des droits civiques et au progrès social, et à ce qu'impliquerait réellement un ensemble de changements massifs en direction d'une société qui ne reconnaîtrait pas le genre. Elle souligne également le fait que trois autres projets ont nécessité et nécessiteront encore des années d’efforts : la fin des distinctions de race et de classe sociale, ainsi que la stabilisation du climat de la Terre. (P.C.)
2023 We are an information revolution species, AI Anthology, ed. Eric Horvitz, Microsoft | Unlocked, mai 2023
Traduction : Nous sommes une espèce de la révolution de l’information, traduit par Erwann Perchoc, Bifrost n°113, janvier 2024
Lien Internet (consulté en février 2024)
Pour Ada Palmer, face à la stupéfaction provoquée par les récents développements en IA, il est nécessaire de prendre du recul et de se rappeler que les révolutions de l’information sont l’état normal de l’humanité. Depuis vingt générations, nous vivons au sein d’une révolution de l’information.
Selon elle, les retombées de l’IA seront essentiellement positives. Elle facilite les choses, permet de créer davantage et démocratise l’expression, l’art, l’information. Bientôt, il suffira d’avoir une idée pour la créer.
Certes, des métiers disparaîtront, mais ce fut aussi le cas dans le passé avec les précédentes révolutions de l’information. Les dangers de ChatGPT et de ses successeurs résident non pas dans la technologie, mais dans la manière dont on gérera leur déploiement. Celui-ci nécessitera de la douceur.
Un autre danger réside dans les fausses informations. Mais ne nous leurrons pas : celles-ci ont toujours existé. L’histoire montre que l’humanité a appris à se défendre contre elles. Il en sera de même avec les infox et vidéotox [deepfakes] générées à l’aide de l’IA. Chaque nouvelle révolution de l’information est plus révolutionnaire, mais apporte aussi plus de démocratie.
Ada Palmer conclut en affirmant que la seule route assurée vers une réelle dystopie est de se convaincre que celle-ci est inévitable, et d’échouer à essayer quelque chose de mieux. (P.C.)
LIENS INTERNET
Sites personnels :
https://www.exurbe.com/?page_id=21 (consulté en août 2020)
Encyclopedia of Science Fiction :
https://www.sf-encyclopedia.com/entry/palmer_ada (consulté en août 2020)
Internet Speculative Fiction Data Base :
https://www.isfdb.org/cgi-bin/ea.cgi?227998 (consulté en août 2020)
Wikipedia :
https://en.wikipedia.org/wiki/Ada_Palmer (consulté en août 2020)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ada_Palmer (consulté en août 2020)
nooSFere :
https://www.noosfere.org/livres/auteur.asp?numauteur=2147203306 (consulté en août 2020)
Quarante-Deux :
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